Les innombrables paysages du Pérou
Un mois pour visiter les incontournables du Sud du Pérou, de Cuzco à Lima, en passant par Arequipa et Ica
Comme disait Jean-Paul Belmondo dans À bout de souffle : « Si vous n’aimez pas la mer, si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas la ville, allez vous faire foutre. » Par contre, si vous aimez tout ça, et que vous n’êtes pas contre un peu de jungle et quelques déserts, alors bienvenue au Pérou. Ce mois passé dans le Sud du pays des Incas m’a emmené au travers des décors toujours plus variés et surprenants. Débuté à Cuzco, la ville des treks en montagne et du Machu Picchu, mon parcours s’est poursuivi jusque Lima en passant par Puno et le lac Titicaca, par Arequipa et son célèbre Canyon de Colca, puis par Ica et ses différents déserts.
2021, le tourisme s’éveille
Nul doute que dans les oreilles d’un bon nombre de curieux, l’évocation du mot « Pérou » laisse avant tout entendre « Machu Picchu ». Placé dans la liste des « sept nouvelles merveilles du monde », le monument inca est à lui seul une raison majeure de poser ses valises dans ce grand pays d’Amérique du Sud. Alors tant qu’à faire, autant commencer par là.
Mais penchons nous d’abord sur le sujet qui fait la une de l’actualité depuis un nombre de mois que je n’ose même pas essayer de compter : le Covid. Parce que le Pérou fut particulièrement touché par la pandémie et que, en comparaison avec ses voisins latinos, il applique toujours des mesures plutôt strictes en ce mois de septembre 2021. Outre les conditions d’entrées qui changent chaque semaine (un jour le certificat de vaccination suffit, le lendemain le test PCR est requis pour tout le monde, difficile de suivre), le port du masque reste obligatoire tant en extérieur qu’à l’intérieur. Soit, rien de surprenant à cela. L’obligation de porter deux masques, l’un par-dessus l’autre, dans certains lieux publics, surprend davantage. Et quand la visière vient s’ajouter pour les longs trajets en bus – plus ou moins confortables selon la compagnie, comme souvent – ça devient difficile de s’y retrouver. Au fond, l’utilité de toutes ces contraintes dans les transports ne semble avoir d’égal que leur respect effectif. Car dès que le moteur s’échauffe et que chacun a pris place, les masques tombent, les visières s’envolent. Il n’empêche, malgré tout, le pays semble vivre (presque) normalement. Très rares furent les activités ou lieux auxquels j’ai dû renoncer pour cause de pandémie. L’accès interdit à Huyana Picchu, la montagne d’où il est habituellement possible de prendre de la hauteur pour admirer le Machu Picchu, est la seule chose qui me vient à l’esprit. Ça et la vie nocturne devenue bien plus calme. Le tourisme revit petit à petit. Ou tout du moins s’adapte à la crise. C’est selon. Puis, retenons toujours le positif : les touristes sont bien moins nombreux que les années précédentes. Les monuments sont moins bondés. C’est toujours appréciable.
Cuzco, les montagnes et le Machu Picchu (8 jours)
Assurément la ville la plus touristique du Pérou, Cuzco est le point de départ d’un nombre impressionnant de treks. Il est sans doute nécessaire de passer des mois, si pas des années, dans l’ancienne capitale historique pour faire le tour complet de la région. Puisque le Machu Picchu est de toute façon un incontournable, mes amis et moi nous disons que quitte à faire un trek, autant en faire un qui inclut la visite de l’ancienne cité inca. Et bon, pourquoi y aller en train quand on peut faire quatre jours de marche au travers les montagnes à la place ? On opte pour le Salkantay Trek, un peu moins populaire que l’Inca Trail car il ne suit pas l’emblématique chemin tracé par les Incas. Qui dit moins populaire dit moins cher. Puis apparemment, les paysages qu’il sillonne sont tout aussi beaux, si pas plus, et donnent un aperçu des différents décors observables dans le coin. Il n’en faut pas plus pour nous convaincre.
Ça sonne un peu ironique, mais le trek de quatre jours débute… en bus ! Quelques heures sur les routes nous emmènent au pied des montagnes. Enfin, « au pied », à 3900 mètres d’altitude quand même… D’ailleurs, autant la randonnée ne peut pas être créditée d’une difficulté insurmontable, autant l’altitude, elle, complique franchement la tâche. Une fois le corps habitué à la hauteur, les éventuels mal de tête, manque d’appétit ou autres symptômes potentiels disparaissent rapidement. Par contre, l’oxygène se faisant quelque peu plus rare, chaque effort s’accentue. Le souffle est rapidement mis à l’épreuve. Les quelques 300 mètres de dénivelés du premier jour de marche semblent être le double. Les 600 du deuxième paraissent presque interminables. Le tout fixe le point le plus haut du trajet à 4630 mètres. Le reste est plutôt tranquille puisqu’il n’y alors plus qu’à redescendre jusqu’aux 2400 mètres où campe le Machu Picchu. Surtout, entre les lacs aux pieds des montagnes, les sommets enneigés ou encore la jungle qui borde les hauteurs de la fin du parcours, les paysages évoluent pour se concurrencer l’un l’autre et font presque oublier l’effort. Puis après quatre jours de marche, le Machu Picchu semble d’autant plus se mériter. Comme les temples d’Angkor au Cambodge, il fait partie de ces monuments qui, même si on les a vus en photos encore et encore sous tous les angles, parviennent malgré tout à surprendre, on ne sait trop comment, quand nos yeux s’y confrontent directement. Il a beau être le plus gros cliché touristique du Pérou, le Machu Picchu mérite sa réputation. Bien joué à lui.
Top 2 dans la liste des sites les plus instagrammables du pays, Vinicunca, la célèbre montagne arc-en-ciel, est notre prochaine étape à Cuzco. Faisons tous les classiques d’entrée de jeu, comme ça c’est plié ! On avait déjà été prévenu, on ne s’attendait pas à voir la « montaña de siete colores » illuminée de couleurs flamboyantes comme le laissent croire les filtres appliqués aux photos qui abondent sur les réseaux sociaux. Pour être honnête, je m’attendais presque à être déçu tant le lieu semble surexploité par les photographes en herbe. Pourtant, sans être fluorescentes, les couleurs n’en sont pas moins impressionnantes et donnent un charme incomparable à cette montagne qui ne ressemble à aucune autre. Première escale du voyage, Cuzco tient toutes ses promesses. Je comprends mieux pourquoi cette ville est l’incontournable numéro un pour les voyageurs au Pérou.
Le parc national de Manú dans la jungle amazonienne (4 jours)
Autre étape, autre paysage et changement d’ambiance complet : direction la jungle amazonienne ! La plus grande forêt tropicale au monde borde une partie plutôt importante du territoire péruvien. Forcément, différents points dé départs pour les tours dans la jungle parsèment le pays, Iquitos, la plus grande ville non-accessible par la route au monde, étant sans doute le plus connu d’entre eux. Plutôt que de prendre l’avion pour retraverser tout le pays, on opte pour le parc national de Manú, directement accessible depuis Cuzco.
Pendant quatre jours, notre guide nous emmène à la découverte de l’Amazonie péruvienne. Pour lui, c’est sa première sortie touristique « post-covid ». Du coup, il paraît presque plus émerveillé que nous face à la biodiversité locale et semble prendre un plaisir fou à guetter le moindre oiseau ou singe, imitant avec plus ou moins de réussite les cris de la faune du coin. On se demande même qui de lui ou de nous a le plus apprécié le tour.
Puno et Arequipa entre lac et canyon (6 jours)
On file ensuite vers le Sud du pays à Arequipa. En chemin, on en profite pour s’arrêter une journée à Puno, au bord du lac Titicaca. Plusieurs îles artificielles habitées flottent sur le lac qui marque la frontière avec la Bolivie. Un tour en bateau permet d’admirer de plus près ces constructions humaines atypiques. C’est plutôt particulier et l’expérience est intéressante, mais c’est loin d’être le point d’orgue du voyage. Tout est très bien prévu pour les touristes et rien ne paraît très authentique. Il n’empêche, ce n’est pas quelque chose qu’on peut voir tous les jours.
Arequipa est réputée pour être une des plus belles villes du Pérou – évidemment la plus belle selon les Arequipeños. De fait, la Plaza de Armas et sa cathédrale annoncent la couleur. L’architecture typique du centre historique de la « cité blanche » vaut le détour. Et comme si tout ça n’était pas suffisant, les trois volcans qui surplombent Arequipa ajoutent encore un charme à la deuxième ville la plus peuplée du pays.
Outre les beautés citadines, c’est surtout pour le Canyon de Colca que de nombreux touristes, nous compris, font étape dans la région. Pour ça, on file à Cabanaconde, d’où partent les principaux sentiers dans le canyon. Enfin, on « file ». Écrivons plutôt qu’on arrive tranquillement après six heures de bus. Une fois sur place, on nous apprend que le chemin est deux fois plus rapide en minibus partagé et pas beaucoup plus cher. Inutile de préciser que nous n’avons pas fait le retour en bus.
Depuis Cabanaconde, trois heures de marche nous emmènent au pied du canyon, où on passe la nuit. L’immensité du deuxième canyon le plus profond au monde impressionne. Les falaises semblent taillées dans la roche tandis qu’une rivière s’écoule quelques milliers de mètres plus bas. Le chemin ne fait que descendre et laisse apprécier sans effort la beauté des lieux. Le lendemain, lorsqu’il faut remonter plus de 1000 mètres sur la journée, c’est une autre histoire. Le soleil tape mais, heureusement pour nous, les nuages nous offrent un répit plus que bienvenu. Même avec ça, le litre et demi d’eau par personne ne suffit pas et dure à peine plus de la moitié du trajet. Les derniers mètres semblent interminables. Les quatre heures de marche paraissent bien plus longues. J’ai rarement été aussi soulagé de boucler une randonnée. Mais bon, les paysages du canyon sont véritablement magnifiques. Ça fait oublier un petit peu la soif et la fatigue. À certains moments en tout cas.
Ica, vous désirez un désert ? (5 jours)
Puisque chaque nouveau point de chute rime avec total changement d’ambiance, on pose ensuite nos sacs à dos à Ica, au milieu du désert, en guise de cerise sur le gâteau de sable avant la fin du périple. Le froid des montagnes et la pluie de la jungle ont définitivement laissé place à la chaleur. L’endroit est principalement prisé des voyageurs pour l’oasis de Huacachina. La petite cité touristique construite autour de l’eau impose au milieu des dunes. Si le décor est impressionnant, c’est encore plus le Canyon de los Perdidos qui a retenu mon attention. À quelques heures de bus – tour guidé oblige mais à des prix tout à fait honnêtes – ce petit coin de paradis est planté au milieu du néant du désert, comme s’il prenait la pose en attendant d’être photographié par les touristes. Découvert il y a peu, le lieu est encore difficile d’accès. Notre bus emprunte un chemin – oui, un chemin, il ne mérite certainement pas l’appellation de route – de sable plutôt improbable au milieu de nulle part. Le tout donne une magie encore plus particulière à l’endroit.
Avant de prendre le chemin du retour vers Lima, où m’attend un vol pour l’Équateur, une ultime étape sur la côte à Paracas s’impose. Après pratiquement un mois au Pérou, l’océan Pacifique se dresse pour la première fois devant nous. Là, après la découverte de la faune des Islas Ballestas, on en profite pour faire du buggy dans les dunes et admirer les plus belles plages de la réserve aux abords de la petite ville touristique. Les plages paraissaient être le dernier incontournable des paysages à admirer en voyage. Elles s’ajoutent à l’impressionnante liste de décors distincts admirés au Pérou. Tout ça sur seulement une moitié du pays. Plutôt pas mal. Première étape d’un long voyage sur le continent américain qui se poursuivra en Équateur, le Pérou a tenu toutes ses promesses.