Pourquoi il faut absolument découvrir Aurangabad?
Est-ce que ça vaut le vraiment le coup de faire un détour par les grottes d’Ellora et d’Ajanta ? Que faire à Aurangabad ?
La majorité des voyageurs en Inde font le choix du nord, c’est-à-dire surtout New Delhi, le Taj Mahal et l’incontournable Rajhastan ; ou du sud, c’est-à-dire principalement Goa et le Kerala. C’est encore plus souvent le cas pour un premier ou unique voyage dans le pays. Pour ceux qui ont plus de temps, on inclut aussi les montagnes de Rishikesh ou la ville sacrée de Varanasi dans l’itinéraire, mais pourquoi donc personne ne passe par Aurangabad ?
Parmi les nombreux voyageurs croisés en Inde, je peux presque compter sur les doigts d’une main ceux qui ont visité les merveilles autour de cette petite ville du Maharashtra. Pourtant, Aurangabad n’est qu’à sept heures de bus ou de train de Mumbai. Une broutille dans l’immensité du pays-continent indien. La ville dispose même d’un aéroport pour les plus pressés par le temps. Alors pourquoi personne ne va là-bas ? Bonne question, car ce fut l’étape préférée de mon itinéraire d’un mois en Inde.
Les grottes d’Ellora
J’arrive à Aurangabad après un peu moins de huit heures de bus de nuit. Le trajet est animé par les bruits de klaxon et les sautillements du bus induits par l’état de la route, mais il est tout de même plutôt confortable. Je passe étonnamment une nuit assez reposante. Un rickshaw me dépose devant mon hostel un peu avant l’aube. Le staff est visiblement encore aussi peu réveillé que le soleil. Tant pis, j’attendrai. J’ai à peine le temps de faire une courte sieste très bienvenue et de poser mon sac à dos dans le dortoir que je suis déjà en route vers les grottes d’Ellora, principale raison de ma venue ici. Un couple argentino-colombien a le même projet que moi et, comme on sympathise assez rapidement, on décide de partir visiter les grottes ensemble.
Il est possible d’atteindre Ellora en bus depuis le centre-ville d’Aurangabad. C’est très peu cher et sans doute pas d’une grande difficulté en demandant conseil aux riverains. Pour ma part, je réserve via l’hostel une sorte de tour en tuk-tuk, qui ne nous revient pas à très cher à trois et qui nous offre davantage de liberté.
Une fois les 600 roupies payées – un peu moins de 7€, le prix d’entrée standard de beaucoup de grands monuments de ce type –, on se retrouve devant la grotte numéro 16, le temple de Kailâsanâtha, peut-être la structure la plus complexe et sans doute la plus impressionnante de l’immense site. On comprend vite pourquoi c’est devant elle qu’est placée l’entrée. Au total, 34 cavernes, qui sont en réalité des monastères dédiés au bouddhisme, à l’hindouisme et au jaïnisme, se répartissent à gauche et à droite du temple principal sur plus de deux kilomètres. Toutes ont été sculptées à même la paroi de la falaise sur plusieurs phases successives entre les VIe et Xe siècles. Excusez du peu ! J’ai peu de mots pour décrire la magnificence de ces lieux et la prouesse architecturale qu’ils représentent. Tant dans le grandiloquent que dans le détail, Ellora est une merveille de l’Inde, et même du monde. Et pendant toute la journée de visite, on ne croise presque aucun touriste occidental.
Les grottes d’Ajanta
Pour visiter Ajanta, oublions le tuk-tuk ou le bus local. C’est beaucoup trop loin pour ça. Plus de deux heures de route sont requises. Coup de chance, on croise deux Anglais à l’hostel dès notre retour d’Ellora et ils sont partants pour se joindre à nous à Ajanta le lendemain. Le prix du transport pour cinq personnes en voiture avec chauffeur est correct.
Les grottes d’Ajanta sont aussi impressionnantes que celles d’Ellora, mais pas si différentes. Le point principal qui différencie les deux séries de cavernes, c’est qu’à Ajanta, les grottes sont peintes. Et elles sont beaucoup plus anciennes puisque les premières excavations datent des IIe et Ier siècles avant J.-C., ce qui rend le lieu encore plus irréel. Mis à part ces deux points, dans la conception générale, c’est assez similaire. À cela près que le cadre est encore plus somptueux puisque les édifices sont taillés dans une falaise escarpée à laquelle fait face une autre tout aussi raide. On croise encore moins d’Occidentaux qu’à Ellora, mais d’autant plus de touristes locaux. D’ailleurs, c’est l’occasion pour moi d’évoquer un point sur lequel je ne suis pas encore aventuré, mais que j’ai toutefois déjà beaucoup expérimenté dès mon premier jour sur Aurangabad : l’obsession de certains Indiens à se prendre en photo avec les touristes étrangers (d’ailleurs pas uniquement caucasiens).
C’est une particularité de la culture dont j’avais déjà eu un (très) léger aperçu à Mumbai. On a l’impression d’être des célébrités. Moi comme les autres backpackers venus d’Europe et d’Amérique du Sud avec qui je bourlingue cette fois-ci. Un peu plus ou un peu moins selon la couleur des cheveux, le ton des iris ou la clarté de la peau, mais tous les voyageurs ont droit à ce traitement particulier. Je ne compte pas le nombre de selfies que j’ai pris avec des Indiens curieux, le nombre de mains serrées et de fois où j’ai répondu à la question « Where are you from ? » suivie d’un chaleureux « Welcome to India ». Ça a un côté amusant, presque flatteur pour l’égo même, pendant un moment. Puis lorsque les interactions ne dépassent plus les dix secondes, que des groupes demandent parfois des dizaines de photos avec toutes les combinaisons possibles des différents membres de la famille, ça finit par devenir agaçant. Surtout quand on ne peut plus faire deux mètres sans essuyer une demande de photo d’un gamin qui a débarqué en courant et en hurlant « Foreigner ! Foreigner ! »
La ville d’Aurangabad
Le lendemain, c’est encore plus flagrant. Si on était pratiquement les seuls Occidentaux à Ajanta, cette fois, on devient même les premiers « Blancs » rencontrés pour pas mal de gens – de leurs dires, en tout cas. On visite Bibi Ka Maqbra, aussi appelé le « faux » Taj Mahal pour sa ressemblance avec celui d’Agra – bien moins impressionnant que son homologue mondialement connu, mais franchement à voir, ne serait-ce que pour le plaisir de comparer les deux – et le Fort de Daulatabad – pas tant plus particulier que d’aucuns des nombreux forts du pays, mais toujours grandiose – sur la journée. Et cette journée, on la passe essentiellement à se prendre en photo avec des locaux, à répondre à leurs questions et à apprendre avec étonnement que non, ils n’avaient jamais rencontré de « Blancs » avant nous. Difficile dès lors de leur reprocher cette excitation à notre rencontre. Surtout quand beaucoup d’entre eux sont des enfants. On est bien obligé de refuser certaines photos, à force, ou au moins de se limiter à un selfie par personne, car sans ça, je pense qu’à l’heure d’écrire ses lignes, je serais toujours là-bas à enchaîner les poses et les poignées de main.
Au moment où nous quittons Bibi Ka Maqbra et qu’on commence presque à être agacé par les regards insistants de tous les curieux des environs, un professeur vient tout contrebalancer. Lui et son groupe de jeunes étudiants s’arrêtent à nos côtés. Ses questions à notre égard se transforment rapidement en véritable échange, il nous apprend beaucoup sur l’histoire du monument, de la ville et de la région. Il rit avec nous autant que les enfants qu’il guide et finit par nous quitter sur une amicale poignée de main, sans oublier de nous remercier chaudement de visiter sa région.
Alors oui, on n’a pas pu se poser et contempler un quelconque monument de bas en haut, mais ce n’est pas bien grave après tout. Ces rencontres surpassent tous les plaisirs visuels possibles. Si ce n’est pas pour ça qu’on voyage, alors pourquoi ? L’Inde est un pays qui se vit et qui s’expérimente plus qu’il ne se contemple. Et c’est pour ça qu’Aurangabad restera mon coup de cœur après un itinéraire d’un mois. Parce que quand des monuments d’exceptions se marient avec un cadre naturel somptueux et des expériences humaines inégalables, que peut-on attendre de mieux d’un voyage dans ce coin du monde ?
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